Désinformer ça rapporte

COVID-19 - Des solutions, pas de polémiques - Daniel Farnier

Le secteur de la publicité est l’élément clé pour comprendre la source numéro un de financement des désinformateurs. Selon les estimations faites par une ONG américaine, les sites de désinformation reçoivent chaque année au moins 235 millions de dollars de recettes publicitaires.

« La publicité est aujourd’hui le moteur de la désinformation. En naviguant sur Internet, on peut voir des petits encarts publicitaires s’afficher sur des sites de désinformation, sans savoir forcément que ces encarts vont financer directement les créateurs des sites consultés.
À chaque fois que l’on se rend sur un site de désinformation, le simple fait de voir une publicité rapporte en effet de l’argent à ce site. Très peu de gens en ont conscience finalement. C’est aussi cela que nous voulons expliquer dans notre documentaire. Nous avons donc examiné le cas d’un des plus grands conspirationnistes américains. L’expert en publicité digitale que nous avons interrogé évalue à 200 000 dollars l’argent qu’il perçoit chaque mois, par l’intermédiaire de la publicité sur Internet. Ce qui représente donc près de deux millions d’euros par an ! ».

Il faut bien comprendre que l’on peut gagner beaucoup plus d’argent en affirmant n’importe quoi, qu’en cherchant à expliquer des faits compliqués. Des affirmations violentes et provocatrices rencontrent toujours un public et cela prend beaucoup moins de temps qu’un travail de recherches et de vérifications effectué par des journalistes.
Cette publicité est financée par des marques qui y trouvent leur compte en s’adressant à de possibles acheteurs.

« Nous nous sommes aperçus alors que tous les secteurs économiques sont concernés, notamment l’industrie automobile, la téléphonie mobile et la grande distribution. Cette étude nous a permis aussi d’établir un classement des marques qui, entre mai et juin, ont le plus financé, par la publicité, les sites de désinformation visés. Il faut savoir aussi que les entreprises ont tout à fait la possibilité de ne pas apparaître sur les sites de désinformation. C’est une question de volonté. Il suffit simplement pour une marque de le dire à son agence publicitaire, de faire ce que l’on appelle une liste d’exclusion. Et d’ailleurs, beaucoup de grandes marques de luxe n’apparaissent pas sur les sites de désinformation. Les marques de luxe sont très vigilantes sur l’image qu’elles peuvent renvoyer. ».[…]

« Une des grandes trouvailles de notre étude réalisée avec 50 citoyens, effectivement, est que cela ne se limite pas à de grandes marques, de téléphonie mobile ou de l’industrie automobile. Des institutions publiques, des associations caritatives financent parfois des sites qui vont carrément à l’encontre des valeurs qu’elles prônent. Il y a une fondation pour la recherche sur le cancer, que nous avons retrouvée sur un site assurant qu’il suffit de prendre de l’eau chaude pour guérir le cancer. Nous avons trouvé des encarts de l’assurance maladie sur un site qui donne des recettes santé extravagantes. En l’occurrence, il est question là de jus de carotte qui aiderait à guérir le cancer… Des choses vraiment hallucinantes, nous en avons trouvé plein et de manière assez significative pour qu’on trouve cela très inquiétant. Ce qui est plus inquiétant encore, c’est que certaines personnes directement responsables de ces institutions publiques à qui nous en avons parlé s’en moquent complètement. ».

(extrait d’un entretien sur France Culture d’Aude Favre et Sylvain Louvet, auteurs du documentaire « Fake news, la machine à fric« ).

Il n’y a pas besoin de policiers spécialisés ou de modification de la loi pour réagir. Que les subventions de l’État et des collectivités locales soient coupées aux associations qui financent la désinformation.